Les aurores polaires,

le cinéma des ours blancs

 

Les aurores polaires sont des apparitions lumineuses célestes d'une grande beauté, très fréquentes aux pôles et bien connues de tous les voyageurs qui ont eu la chance d'aller dans ces régions. On les observe depuis longtemps (traces d’observations en 593 av. J.C.), mais on les étudie surtout depuis ces 70 dernières années. Elles peuvent prendre différentes formes lumineuses : des arcs, des draperies, des filaments, des couronnes, des flammes... en mouvement! Certains y voyaient des fantômes, des géants ou des nains ayant allumés des feux, ou la visite d’extra-terrestres; on les a même chassées au couteau! On a longtemps cru que ces aurores provenaient des reflets de lumières sur les glaces polaires, mais on sait aujourd’hui que leur apparition est liée au soleil. Alors, d'où proviennent ces phénomènes et quels sont les mécanismes d'émission? Comment les observe-t-on?

I. Mécanismes des émissions lumineuses.

1. Le vent solaire.

Notre soleil, comme toute étoile, a une intense activité nucléaire, générant par fusion nucléaire plusieurs éléments à partir de l'hydrogène (un proton et un électron). L'énorme énergie dégagée par ces fusions provoque parfois la dissociation de ces atomes en protons et électrons qui s’échappent dans l'espace, contribuant au vent solaire. Ce vent est d'une densité à peu près égale à 8 particules.cm-3, et à une vitesse de l'ordre de 400 km.s-1, celles-ci mettent environ 4 jours pour parvenir jusqu'à la Terre.


protubérance

L’activité solaire évolue par cycle de 11 ans et présente un pic d'activité révélée par l’apparition d'un plus grand nombre de tâches et de protubérances, particulièrement génératrices de vent solaire.

 

2. Le magnétisme terrestre.

La Terre se protège des particules spatiales par sa magnétosphère. Quelques-unes des particules du vent solaires sont attirées par le champ magnétique terrestre et capturées par les ceintures de Van Allen qui sont au nombre de deux : l'une est chargée positivement, l'autre négativement. (Les particules prises au piège suivent un mouvement complexe non détaillé ici.)

Ces particules parviennent même à saturer ces ceintures : l'excédent est alors déversé hors de celles-ci. Elles accélèrent ensuite vers les pôles selon les lignes de champ en accumulant de l'énergie. Certaines de ces particules, suivant l'angle d'arrivée sur l'atmosphère, y pénètrent ou rebondissent.

Ceintures de Van Allen

 

Vent solaire et magnétisme terrestre

 

3. Emissions lumineuses.

Les particules qui arrivent à pénétrer dans la haute atmosphère viennent percuter les atomes qui y sont présents, et leur cède leur énergie. L'atome parvient alors à un état dit excité. En effet un atome possède plusieurs niveaux d'énergie. Lorsqu’il reçoit de l'énergie, ses électrons passent sur une "couche supérieure" qui correspond à un niveau d'énergie plus élevé. Ces niveaux d'énergie sont remplis dans l'ordre suivant : 1s, 2s, 2p, 3s, 3p, 4s, 3d, 4p, 5s, 4d...(d'après la règle de Klechkowski)

L'atome qui est alors dans un état instable tend à revenir dans son état le plus stable. Il cède alors une énergie équivalente à celle reçu par les particules sous forme de photons, des grains de lumière de longueurs d'ondes différentes.

L’énergie d’un photon est donnée par la formule :

e = h n

D’autre part, le rayonnement est caractérisé par sa longueur d’onde l telle que :

l = c / n Þ n = c / l

d’où

e = h c / l

Où h = 6.62559 10-34 J.s (constante de Planck).

n est la fréquence de rayonnement.

c=3 108 m.s-1

La couleur étant liée à la longueur d'onde, la couleur de l'émission dépend donc du type d'atome et de l'énergie fournie lors de la collision particule - atome. Notons que les particules solaires arrivent dans la haute atmosphère avec une énergie allant d’une centaine d’eV jusqu’à une centaine de keV. Dans certains cas, les protons peuvent même parvenir à une énergie de l'ordre du mégaélectronvolt ! (Une particule a une vitesse vérifiant la formule v=, où v est la vitesse en m.s-1, ε est l'ιnergie en joules, m la masse en kg. Un proton ayant une énergie de 1 keV a donc une vitesse de l'ordre de 437 km.s-1).

Ces émissions de lumière constituent une aurore polaire.

 

II. Etude des aurores polaires.

On étudie les aurores depuis longtemps mais notamment ces 70 dernières années. Pour leurs études, diverses expériences ont été réalisées, notamment la création d’aurores artificielles par injection d’électrons à partir de fusées.

1. Composition de l'atmosphère - haute atmosphère.

Les aurores se forment le plus souvent entre 90 et 300 km d'altitude. Les couleurs sont le reflet des atomes percutés, de leurs états (neutres ou chargés), et de l'énergie des particules incidentes. L'étude des couleurs des aurores permet donc de déduire les atomes présents dans la haute atmosphère. Celles-ci peuvent être rouges, parfois avec un soupçon de vert, de bleu, de jaune, de blanc. Mais elles sont généralement blanchâtres avec des reflets verts, rarement rouges. Leur faible luminosité permet mal a l'oeil humain de distinguer les couleurs. C'est pourquoi on étudie leurs spectres.

Par ailleurs, un atome excité cherche à revenir dans état plus stable le plus rapidement possible. Entre 90 et 180 km, l’intensité de la raie rouge de l’oxygène est faible, car les atomes d’oxygène (dans l’état noté (1)) mettent beaucoup moins de temps pour entrer en collision avec les autres constituants de l’atmosphère que pour émettre de la lumière (la raie rouge à 630 nm dure 110s). Ces atomes dans l’état (1) ont donc plus de chance de céder leur énergie à leurs voisins au cour d’une collision que de se désexciter seuls en émettant un photon (phénomène de désactivation collisionnelle). De plus la décroissance exponentielle de la densité atmosphérique à mesure que l'altitude augmente entraîne une diminution identique de la fréquence des chocs entre atomes et au-delà de 200 km environ, ces collisions perdent de l'importance. Ainsi en altitude, on observe une intensité lumineuse plus grande.

Or, dans les conditions des aurores, ce sont les électrons secondaires de moindre énergie qui assurent l’essentiel de l’excitation (quelques eV). L'énergie d'excitation du niveau (1) (1.96 eV) est plus faible que celle du niveau (2) (4.17 eV) : la probabilité d'excitation du niveau (1) est donc plus grande.

Ces deux effets cumulés (l’excitation du niveau (1) plus probable ainsi que les émissions en haute altitude) aboutissent à une intensification considérable de la raie rouge au-delà de 200 km, qui devient alors largement majoritaire.


Oxygene (O)         Azote (N)    

On peut également retrouver les spectres d’émission de l’hydrogène avec les raies de la série de Balmer dans le visible (656.2 nm, 486.1 nm, 434.0 nm), et de la série de Lyman dans l’ultraviolet (121.6 nm)...

2. Observations.

Les aurores peuvent se produire dans la haute atmosphère entre 60 et 2000 km d'altitude mais elles sont généralement situées entre 90 et 300 km. Les particules incidentes suivent les lignes de champ, donc les aurores se forment le long de ces mêmes lignes de champ, et du fait de la symétrie des ceintures de Van Allen, elles ont lieu simultanément au nord et au sud.

Elles ont lieu toute la journée mais ne sont observables que la nuit, et peuvent durer de plusieurs minutes à plusieurs heures.

Mais pour leur étude, il est nécessaire de les observées avec des appareils (caméra "plein ciel", photomètres) pour décomposer les spectres et analyser la lumière invisible à l’oeil nu, car l’oeil possède un seuil de détection des couleurs.

Ainsi, elles sont généralement observées au-delà de 60 degrés de latitude nord ou sud : on les appelle alors respectivement aurores boréales et australes. Les principales observations se font au nord du Canada, en Alaska (U.S.A.) et au nord de la Scandinavie : par exemple, à Fairbanks et Nome (Alaska, U.S.A.), plus de 200 jours avec aurores sont observés chaque année. Mais on a pu en observer jusqu’à Bombay, à 10° de latitude nord (le 21 février 1872) grâce aux explications du paragraphe précédent (diffusion fluorescente).

Par ailleurs, on observe une coïncidence entre le cycle solaire de 11 ans et l’apparition des aurores, mais les protubérances et les taches solaires n’engendrent pas forcément de grosses aurores.

A cause de la forme des lignes de champ, l’aurore a une forme elliptique - l’ovale auroral - centré sur les pôles magnétiques, à environ 700 km des pôles géographiques. La grandeur de cette forme dépend de l’activité solaire : plus le soleil est "silencieux" et le vent calme, plus l’ovale est petit, et inversement.

Remarque : le flux des électrons solaires qui parviennent jusqu'à la Terre est de 20 à 100 fois plus intense que celui des protons (de l'ordre de 106 à 1010 e-.cm-2.sr-1.s-1).

Remarque : les aurores sont classées suivant leurs intensités lumineuses :

Indice 1 : référence de luminosité : la voie lactée.

Indice 2 : luminosité équivalente : cirrus éclairés par la lune.

Indice 3 : luminosité équivalente : cumulus éclairés par la lune.

Indice 4 : luminosité équivalente : très brillantes, peuvent projeter des ombres,

comme l’illumination du sol par pleine Lune.

Conclusion

Nous avons présenté la théorie la plus communément admise dans le monde scientifique : ainsi, ce sont les particules émises par le soleil, attirées par le géomagnétisme et qui pénètrent dans l’atmosphère qui sont à l’origine des aurores. D’autres phénomènes sont liés aux aurores, telles que les perturbations radio et téléphoniques ou bien les sous orages magnétosphériques que nous n’avons pas développés ici. Citons également les radioamateurs qui se servent des aurores radioélectriques pour augmenter la portée de leurs appareils (due aux irrégularités de densité électronique). Mais les aurores possèdent encore de nombreux secrets et nous ne sommes pas près de tout connaître à leur sujet. D’autre part, la Terre n’étant pas privilégiée par rapport aux autres planètes du système solaire face au vent solaire, il existe des aurores polaires sur d’autres planètes, telles que Jupiter et Saturne, ce qui nous révèle que ces planètes possèdent donc une atmosphère et un magnétisme propre.

Références :

- © 1997 Encyclopaedia Universalis.

- Encyclopédie Microsoft® Encarta® 97.

- Guide de l’astronomie , LarousseÒ

- Illustrations : Encyclopédie Bordas®.

- Réseau Internet :

* http//:www.oma.be/BIRA-IASB/Project_educatif/Aurore_polaire/aurore_polaire.htm

* http//:www.sat-net.com/space-news/hst01.html

* http//:www.geo.mtu.edu/weather/aurora/

* http//:www.meteo.org/phenomen/aurores.htm

 

Autre théorie (selon Patrick Newell): accumulation de charges dans l'ionosphère car faible conductivité puis précipitation des particules : "sorte de décharge électrique, comme pour les éclairs..."